Restitution du tambour parleur : les autorités françaises disposent désormais d’un délai d’un an pour transférer le bien à la République de Côte d’Ivoire

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Confisqué en 1916 par les autorités coloniales françaises, le tambour Djidji Ayôkwé, trésor culturel du peuple Atchan, va enfin retourner en Côte d’Ivoire. Malgré un engagement présidentiel depuis 2021, il aura fallu une loi spécifique, votée en2025, pour permettre ce transfert.
Le lundi 7 juillet 2025, une loi dérogatoire a enfin été adoptée. Elle stipule que le tambour parleur cesse d’appartenir aux collections publiques françaises, ouvrant la voie à son retour en Côte d’Ivoire.
La Côte d’Ivoire formule officiellement sa demande de restitution en 2019, dans le cadre d’une liste de 148 œuvres réclamées. Le président Emmanuel Macron s’engage à restituer l’objet en 2021, mais le processus s’enlise. Ce n’est qu’après une visite de sénateurs français en Côte d’Ivoire que le dossier est réactivé, et des propositions sont formulées auprès du ministère de la Culture.
La France, pourtant initiatrice du débat avec le rapport Sarr-Savoy en 2018, peine à faire avancer un cadre législatif global. Contrairement à l’Allemagne, la Belgique ou la Suisse, la France est vouée à faire voter des lois pour chaque objet restitué.
Comme l’explique Vincent Negri, chercheur au Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS) et spécialiste du droit international de la culture et du patrimoine, « les collections publiques appartiennent à l’État. Elles sont protégées par un régime d’inaliénabilité et d’imprescriptibilité. Il faut comprendre cette notion comme l’interdiction d’en transférer la propriété à quiconque ». C’est pourquoi, malgré l’engagement politique, une loi spécifique était nécessaire pour autoriser la restitution du tambour.
Le tambour parleur
En 1916, des villageois refusent de participer aux travaux de construction d’une route entre Abidjan et Abobo. En guise de représailles, l’administration coloniale française confisque le tambour. Exposé au musée du Trocadéro en 1929, il rejoint plus tard le musée du quai Branly, où il est restauré en 2022, puis conservé dans une caisse, en attendant une décision officielle.
Le Djidji Ayôkwé, encore appelé tambour Ébrié, est bien plus qu’un simple instrument de musique. Ce demi-cylindre de bois de 3,30 mètres, pesant près de 430 kg, jouait un rôle central dans la vie sociale et politique du peuple Atchan. Son son portait jusqu’à 20 kilomètres, permettant de convoquer des assemblées ou d’alerter en cas de danger. Véritable outil de communication communautaire, il symbolise une forme d’organisation autonome précoloniale.